samedi 5 avril 2008

FABLE

LA JUMENT ET L'ÂNE


Que ce soit dans les salons, les cours de récréation,
L'âne souffre d'une bien mauvaise réputation.
Il traîne avec lui son ignorance,
Son inculture, son fardeau d'incompétence.
Mais on ne peut juger quiconque sur son engeance,
Son origine, son aspect, son apparence.
A chacun sa personnalité
Quelle que soit sa parenté.
Un fermier un jour emmena sa jument
Paître les chardons et les herbes de son champ.
Mais au fil des journées, la bête maigrissait.
De jour en jour, elle dépérissait.
Le paysan, craignant une maladie fatale
Fit venir un véto pour soigner l'animal.
Après un examen approfondi de la jument
L'homme de l'art rendit son jugement.
"Votre bête est atteinte de neurasthénie,
Il faut seulement lui donner compagnie."
N'ayant qu'un âne à mettre dans l'enclos
Il amena le quadrupède aussitôt.
A la vue de l'arrivant la jument rigola
Et de l'allure du baudet se moqua :
"Mais qu'est-ce que c'est que ce mini cheval
Affublé d'oreilles de taille anormale ?
- C'est tout, c'est un peu court, jument !
On pouvait dire... Oh ! Dieu ! Bien des choses assurément
En variant le ton, tenez, par exemple :
Pratique : "Avec un système auditif si ample,
Il vous faut des kilos d'amidon ma foi
Pour le tenir si droit."
International : "Quand vos portugaises sont ensablées,
Il faut un bulldozer pour les dégager."
Amical : "Aimez-vous les fumeurs aussi haut
Que vous leur offrez de telles étagères à mégots ?"
Prévenant : "Quand vous évacuez le cérumen,
Il vous faut commander une benne !"
Malin : "Faut-il que vous goûtiez à ce point le son
Qu'on vous a affublé de tels pavillons."
Voilà ce qu'à peu près ma chère, vous m'auriez dit
Si vous aviez fait preuve d'un peu d'esprit.
Un âne qui parodie Edmond Rostand,
La jument n'en demandait pas tant.
Ravie d'entendre un tel érudit
Elle trouva le bourriquet de bonne compagnie.
Depuis ce jour, aux champs comme à l'étable
Les deux équidés devinrent inséparables.

GEDE


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