lundi 22 décembre 2008

CONTE DE NOEL

CONMPTES DE NOËL (2/4)

Elle avait quand même réservé une table dans un restaurant, le Fiché Bauche que dirige Jean Pierre Coffre. Alors qu'elle s'était installée à la table que le maître d'hôtel lui avait indiquée, elle reconnut le garçon qui venait vers elle : "Le bellâtre du 3ème !" pensa-t-elle, "La bêcheuse du 5ème !" reconnut-il. Elle était dans son rang, il serait son serveur. Bien que voisins, leurs relations jusqu'alors n'avaient jamais dépassé le minimum de courtoisie, soit le bonjour ou le bonsoir suivant qu'ils s'étaient croisés le matin ou le soir. Ils n'avaient même jamais parlé de la pluie et du bottin, jamais pris un café ensemble. Quand il s'approcha, il l'a salua comme n'importe qu'elle cliente, elle le regarda comme n'importe quel serveur. Il lui proposa la carte et s'éloigna pendant qu'elle choisissait. Comme elle était seule et que pour elle, l'unique plaisir de cette nuit là était la jouissance du palais, elle n'hésita pas à prendre ce qu'il y avait de meilleur : Après un kir on the rocks en apéritif, elle choisit en entrée des belons de Cavaillon et des pattes de sauterelles farcies, puis des yeux de merlans frits, une tourte aux cailles, un bolino Chateaubriand à la sauce diable, un chapon de Normandie accompagné de pommes allumettes flambées au phosphore. Le tout arrosé d'un grand Château Cadet de Messoucis primeur de 1934. En multipliant les plats, le dîner se prolongerait au maximum. De plus, ce serait l'occasion de voir le serveur plus souvent, car finalement, il était plutôt pas mal.
Le repas se déroula jusqu'à bien tard dans la nuit. Cindia finit tous les plats et vida la bouteille de vin sans que cela n'altère en rien ses capacités intellectuelles et physiques. Elle avait passé la soirée à regarder les autres convives manger, boire et danser et s'était régalée du spectacle que ceux-ci lui avaient offert bien involontairement. Mais c'est avec une attention toute particulière qu'elle avait suivi les allées et venues de son voisin. Elle admirait sa maestria à passer entre les rangs serrés des commensaux les plats en équilibre au bout du bras, c'était un professionnel. Après les fromages, le riz charlotte à la crème fraîche, le café et le pousse café, elle appela le garçon pour lui demander l'addition. La nuit était bien avancée, les clients quittaient les lieux, les serpentins étaient retombés, l'ambiance s'était feutrée et les paupières devenaient lourdes. Quand elle vit le chiffre au bas de la note, sans rechigner elle déposa sa carte bancaire dans la soucoupe mais trouva quand même que cette année, le compte de Noël était salé.
à suivre...

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